Bons baisers de Fort-de -France
Notre île ensoleillée baignait dans un océan de senteurs de
couleurs, de parfums et de sons.
C’était un décor qui faisait rêver et qui nous invitait à la
promenade.
Main
dans la main, nous étions en train de flâner sur la savane de
Fort de France et nous pensions au livre Cahier
d’un retour au pays natal du poète
et député-maire Aimé Césaire. Plus
militant encore, vous faisiez référence à l’ouvrage Peau noire, masques blancs du psychiatre Frantz Fanon
Je guettais vos yeux rieurs et surtout votre bouche ô combien insolente.Elle me chuchotait en effet des mots
tendres qui me faisaient rougir. Je faisais partie de celles qui appartenaient à
la catégorie des câpresses caribéennes
à la peau très claire, aux cheveux crépus.
Je me sentais emmitouflée dans votre regard généreux et votre sourire sensuel qui laissaient transparaître le patchwork de vos
racines afro-indiennes.
Notre légèreté suivait le rythme de la brise qui
caressait les palmiers indolents.
La Savane était donc devenue pour nous un havre de
tranquillité. Vous, guadeloupéen, oh pardon de Capesterre Belle-Eau, aviez l’impression de vous
retrouver dans votre mangrove et dans vos plantations. Moi, je m’imaginais avec vous seuls sur votre
archipel désert. Nous aurions alors pu jouir d’une indépendance d’esprit et
d’une véritable liberté, étant débarrassés des lourdeurs de l’histoire qui
pesaient sur notre jeunesse.
Je comprenais en effet pourquoi vous aimiez tant me répéter cette citation
tirée du Discours sur le colonialisme
du poète martiniquais qui ne cessait de nous interpeller :. « Je parle de millions
d'hommes à qui on a inculqué savamment la peur, le complexe d'infériorité, le
tremblement, l'agenouillement, le désespoir, le larbinisme. »
Vous aimiez mon
allure féministe et rebelle proche
d’Angela Davis. Nous avions tous les deux la coiffure afro, c’était dans l’air du
temps des revendications identitaires, parfois radicales.
Sur les bancs
publics, des hommes refaisaient le monde, et parfois la sieste. Des oiseaux
nous accompagnaient près du kiosque à musique. Des lézards au soleil étaient réveillés et importunés par
les cailloux lancés par des enfants turbulents.
J’avais une envie
folle de me blottir sur votre poitrine
lisse , dévoilée par une chemise colorée de petites fleurs mais des matrones, chargées de
marchandises, dandinaient comme des tortues vers les « grands taxis
pays ».
Une marchande de
pistaches ponctua l’atmosphère d’un cri
de vente percutant dans ce parc assoupi. Collés au tronc du palmier, nous
trouvâmes un instant d’intimité. Vos
baisers, au goût de limonade, furent empreints d’éternité.
Le cahier de nos
amours au pays natal by Alex J. URI
Paris october 29,
2014
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