mardi 11 septembre 2012

Alexander & Teresa " la nouvelle vie d'Elisabeth"




  Alexander de GUADELOUPE &  Teresa de TRINIDAD
By Alex J.URI
Feuilleton été  2012/Episode 30
Elisabeth s’était repliée dans la banlieue parisienne comme beaucoup d’originaires d’Outre-mer  au moment même où la guerre d’Algérie était devenue un conflit sanglant. La conquête de l’indépendance demandait de la détermination et du sacrifice. Sur le plan personnel, Elisabeth était  prête en payer le prix pour se libérer d’une relation qui l’emprisonnait. AJU

 « La nouvelle vie d’Elisabeth »
Elisabeth était marquée dans sa chair et  dans son âme par le scandale que sa liaison  adultérine avec un notable de sa bourgade avait provoqué. Elle collait même à l’actualité qui  empoisonnait la vie de tous les jours à Paris depuis huit ans. En  mars 1962, son état d’esprit correspondait un peu à  celui de cette Algérie  déboussolée qui sortait  d’un conflit sanglant. Elle aussi avait perdu du sang et des enfants mais   à cause des avortements causés par le Dr SAM




ARI. C’était aussi une guerre, déclarée dans le secret, pour prendre à sa cousine un bonheur qu’elle convoitait. Elle se retrouvait comme et avec les Pieds noirs qui avaient fui un pays qu’ils aimaient, parce qu’ils n’avaient pas le choix. Dans le même temps, comme les Algériens en quête de liberté, elle éprouvait les douleurs et  les plaisirs  de l’indépendance.
Elisabeth était arrivée  en France avec un moral au plus bas. La morosité la rongeait. Elle ressassait sa décision d’avoir  quitté amant et enfant. A la manière des partisans de la libération d’un pays, elle avait longuement mûri sa stratégie face à celui qui la colonisait. Elle avait même différé de semaine en semaine l’assaut, avant de passer à l’offensive.  Départ irrévocable. Elle avait fait sauter les ponts qui la reliaient à l’influence possessive du Dr SAMARI. Du même coup, elle avait  coupé le cordon ombilical qui l’attachait à sa terre natale. Il lui fallait  gérer à la fois la rupture avec celui qui avait  la clé de ses entrailles, le serrurier des portes aujourd’hui  fermées de sa jouissance.  La rupture avait aussi enfanté une autre séparation qui lui donnait parfois un sacré mal de tête. En effet, penser à son ange créole lui rappelait la tentation de ce démon qu’elle aimait tant. Elisabeth ne comprenait toujours pas quelle alchimie incontrôlable avait transformé son plaisir amoureux en déshonneur. L’amour du Docteur SAMARI l’avait grisé et  les moments passés avec lui se fixaient dans les décors d’un monde paradisiaque. Pourtant, son rêve avait les limites que lui imposait la réalité. La rupture s’accompagnait alors d’un héritage qui avait un visage, celui de la petite Teresa. Blanche créole, elle revenait sur des terres qui avaient engendré d’autres ruptures avec ses  parents. Elisabeth se sentait ainsi comme une belle étoffe souillée qui se déchirait et dont les morceaux, livrés au vent, s’éparpillaient dans la fraîcheur d’un printemps, subissant l’hypocrisie d’un rayon de soleil. La France sans l’Algérie devait s’adapter et Elisabeth sans les Antilles-Guyane avait migré comme beaucoup d’Antillaises des années soixante. Elle devait « s’acclimater ».La France sans le soleil des tropiques était devenue ou perçue pour beaucoup comme une terre de promotion  et d’ascension sociale. Elisabeth, propulsée dans la découverte d'une nouvelle vie, habitait chez sa sœur dans la banlieue sud de Paris et y avait trouvé un emploi. Elle pensait bien sûr à TERESA,  caressait même l’idée  de la faire venir, mais la vie dans l'hexagone n'était pas facile, surtout pour y élever un enfant, seule. Alors les jours  passaient, les mois et les années aussi.
 Le silence de sa maman commençait à peser  et elle s’était résignée au bourdonnement de Man ROSITA. Cette  nourrice était un véritable essaim d’abeilles et Teresa lui servait de ruche. Les activités de Man ROSITA dépassaient allègrement la mission qu’on lui avait confiée. Les nouvelles de Teresa qui parvenaient à Elisabeth n’étaient  pas toujours rassurantes quoique folkloriques. Elle  avait  appris  ainsi par sa sœur  dans l’île de Madinina  qu’on avait « découvert » Man ROSITA dans des « séances de sorcellerie ». Alors qu'elle était  en vacances avec Teresa dans la famille d’Elisabeth, Man ROSITA  s’était livrée sans aucune crainte à une activité polyvalente et multiculturelle relevant du sorcier en herbe, de  l’apprenti guérisseur et du prêtre exorciste. Man ROSITA en sueur fut surprise en train de faire des incantations autour de Teresa, elle même couchée sur un lit entouré de bougies. Man Rosita prétexta avoir trouvé une manière de soigner les crises d'asthme que Térésa faisait régulièrement,  sans se préoccuper, à l’évidence, du fait que sa démonstration incantatoire et carnavalesque ne lui épargnait en rien un incendie infernal  dans la case en tôle. Miracle, une main divine avait tout éteint. Dieu en profita pour extraire Teresa des mains de Man ROSITA  visiblement en  transes. Elisabeth demanda de lui renvoyer   sa fille  âgée de six ans. Le bonheur avait frappé à sa porte. Il s’appelait Théophile de TRINIDAD.
©2012 Alex J. URI  Alexander de Guadeloupe  et Teresa de Trinidad





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