mercredi 19 novembre 2014

Les confessions du Père Joseph

























Les confessions du Père Joseph




« Dans nos îles, face aux violences qui nous étreignaient, nous devions garder notre lucidité et trouver le chemin du recueillement pour comprendre.
Des vies étaient fauchées comme si  quelque chose avait forcé leur destin. Le fatalisme, la résignation, la croyance en Dieu ne suffisaient  pas à nous apporter des éléments de réponse qui rassuraient. Il y avait là, me semble-t-il , des erreurs de diagnostic. Notre raisonnement était basé sur le fait que notre île était paradisiaque, que c’était une oasis du Bien. Or les crimes commis devenaient inattendus, spectaculaires et effrayants.

Père JOSEPH avait les oreilles du confessionnal. Les fidèles avaient déserté progressivement l’église  mais quand il fallait s’alléger du fardeau des péchés, les croyants retrouvaient les vieux réflexes salvateurs. Le curé découvrit alors que la sorcellerie était ancrée dans les mœurs  d’une société néocoloniale.  Sans jouer aux psychiatres, on occultait un fait essentiel, celui que le Mal avait lui aussi son don d’ubiquité.

Il y avait une souffrance qui s’habillait et se déguisait. Elle venait de cette violence des rapports  conflictuels dans les domaines de la culture, de l’économie et de la politique. Ce contexte favorisait les fragilités, les instabilités et un terreau pour une détresse créole.  La religion devenait une protection contre la détresse, le quimbois aussi.
Selon « Padre »Joseph, la quimboiserie était en plein essor. Des familles s’y adonnaient  pour briller  dans une logique de compétition malsaine,  de jalousie, de haine. Les comportements se révélaient aussi pervers  que les effets de la mondialisation  qui faisait imploser ces sociétés apparemment modernes mais profondément ancrées dans  un néocolonialisme viral.

C’est donc ainsi que les âmes se déstructuraient et que le corps social se délitait
Nos sociétés surfaient sur des crises comme sur des vagues et dans la tourmente, nous vomissions nos méchancetés.
L’homélie du curé s 'apparentait à un appel au secours. La vigilance s’imposait  alors pour le respect de nos identités et de nos libertés.
Nous devrons, sans aucun doute, prier ensemble quand c’est possible, pour réparer les âmes qui partent à la dérive et retrouver ainsi la paix dans le tréfonds de notre inconscient collectif.

Extrait de Les rêveries tropicales d’Alexander by Alex J. URI
Paris le 19 novembre 2014








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