Gil Thémine plaide en faveur d'un port en eau profonde en Guadeloupe
Alex J. Uri : La Guadeloupe est un archipel et abrite comme d’autres îles des ports consacrés au commerce avec l’extérieur. Pourquoi aujourd’hui un tel engouement pour un port en eau profonde ?
Gil Thémine, Président du Port Autonome de la Guadeloupe. Le port autonome de Pointe-à-Pitre est un établissement public de l’Etat dont l’impact économique et le rôle ont largement été sous-estimés depuis sa création. Il a surtout été perçu comme un instrument au service des importateurs et non comme un vecteur de développement associé à une stratégie globale. Le port a été plus subi qu’utilisé comme un instrument à part entière du développement économique de la Guadeloupe.
Port autonome de la
Guadeloupe à Pointe-à-Pitre
Alex J. Uri, Rédacteur en chef (direction régionale de l’information à France Télévisions). Vous êtes président du Port Autonome depuis 2005. Qu’avez-vous fait pour corriger cette perception et donner à ce port les ressorts pour qu’il devienne un tremplin au développement économique de cet archipel dans
Gil Thémine. Les premières années ont été consacrées à l’observation et aux études mais aussi à l’examen des enjeux et des forces en présence. Elles permettent de constater que le Président du Port Autonome ne peut s’exprimer que dans le cadre de relations de travail et de confiance avec un Directeur général (à ce propos, je rappelle qu’il est nommé en conseil des ministres).
Un rapport récent du Sénat confirme que jusqu’à 2008, date à laquelle la réforme des ports autonomes devenus grands ports maritimes, la stratégie de l’Etat était peu perceptible par les différents acteurs. J’ai donc exploré d’autres enceintes pour enrichir notre réflexion. Ma participation aux conférences de l’AAPA (Americana Associations of Port Authorities) m’a permis de comprendre que les travaux initiés au Panama pour la réalisation d’un troisième jeu d’écluses allaient profondément modifier le transport, le stockage des marchandises. Il y a aussi l’augmentation mécanique de la taille des navires qui appelle des tirants d’eau supérieurs à ce que nous avons aujourd’hui.
Alex J. URI En conséquence, si vous n’engagiez pas une réforme adaptée à cette nouvelle problématique, le Port Autonome risquerait d’être hors jeu dans ce nouveau commerce maritime.
Gil Thémine . J’ai convenu avec le Conseil d’Administration qu’il devenait urgent de lancer un projet de grand port pouvant relever ces nouveaux défis et donner à la Guadeloupe l’étoffe nécessaire pour jouer un rôle déterminant dans toute nouvelle configuration en terme de trafic.
Alex J. URI : Comment va se réaliser ce projet de port en eau profonde ? Quelles sont les différentes étapes sur le plan administratif et politique ?
Alex J. URI : Comment va se réaliser ce projet de port en eau profonde ? Quelles sont les différentes étapes sur le plan administratif et politique ?
Gil Thémine : Trois conditions : tout d’abord l’accord de la tutelle, le ministère des transports, ensuite l’accord de la population, ce qui va être fait dans un débat public et c’est la première fois que cela se produit en Guadeloupe (il y a une commission du débat public et vingt communes y sont déjà inscrites). Enfin, la condition du marché. Ce marché sera sollicité dans le cadre d’un appel à projet international dont les réponses nous parviendraient à la mi septembre. Passé ce délai, nous saurons si notre projet intéresse la communauté portuaire internationale.
Alex J. Uri : Comment expliquer que vous ayez aujourd’hui les moyens de faire ce que d’autres n’ont pas envisagé faute de concertation et de volonté politique ?
Gil Thémine : J’ai bénéficié d’une situation conjoncturelle propice : le trafic maritime mondial a chuté avant d’amorcer une nouvelle reprise depuis 2009. Cette reprise a focalisé l’attention des gouvernements des pays du monde entier sur l’importance vitale du trafic maritime. Moi, Guadeloupéen, j’ai saisi l’urgence et l’importance de ces questions dans la conjoncture nationale. A l’évidence, nous ne pouvions rester à l’écart des grandes réflexions sur ces secteurs d’activité sous peine d’être plus tard marginalisés. Ces réflexions mettent en lumière l’importance stratégique de ce secteur d’activité pour l’économie mondiale et bien évidemment caribéenne dans le contexte des relations Nord Sud ou Sud Sud.
Alex J. Uri : Quels sont les obstacles majeurs à la réalisation d’un tel projet de port en eau profonde ?
Gil Thémine : C’est le marché ! Ce sont les armateurs et l’opérateur privé qui doivent choisir la Guadeloupe comme nouveau hub de transbordement en considérant que sa position géographique est une des plus favorables et demandent à faire ajouter la construction d’un nouveau terminal. Cette construction doit être assortie d’une réflexion sur le statut fiscal et douanier de la zone.
Alex J. URI
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